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Thonon-les-Bains - Ancien couvent de la Visitation


L’ancien couvent de la Visitation de Thonon-les-Bains (Haute-Savoie) est un complexe bâti d’environ 2 900 m² situé à l’est-sud-est du bourg médiéval et moderne de Thonon. Il s’agit d’un ensemble inscrit aux Monuments Historiques pour son enveloppe extérieure (1973) et pour les sentences du XVIIe siècle découvertes dans les années (1988).


Les grandes lignes de l’histoire du site et de la communauté sont connues par les sources : fondation de la communauté à Évian en 1625, transféré à Thonon en 1627, elle acquiert des bâtiments sur le site du couvent en 1633 et les occupe au plus tard en 1637. À l’exception d’une période d’occupation laïque de 1793 à 1835, le couvent est occupé jusqu’à la fin des années 1960 et la restructuration de l’ensemble du quartier. Le complexe accueillait au début du XXIe siècle la médiathèque et divers autres services et structures culturelles, qui toutefois n’occupaient pas l’intégralité du bâti. Le projet d’installation d’un nouveau pôle culturel dans le bâtiment a amené le Service régional de l’archéologie à prescrire une étude de bâti – à laquelle s’est ajouté une petite fouille sédimentaire – dont l’intervention s’est étalée tout au long des travaux, de 2016 à 2018.


Un des objectifs de cette opération était d’analyser le bâtiment ouest sur la rue des Granges dont le plan semblait traduire un parcellaire préexistant de la fin du Moyen-Age ou du début de l’époque moderne. Les nombreux sondages ouverts dans ce bâtiment n’ont malheureusement pas permis d’identifier d’éléments antérieurs à la fin du XVIIe siècle ou au début du XVIIIe siècle. À l’inverse le bâtiment sud-ouest, réputé construit dans la seconde moitié du XVIIe siècle forme, dans son premier état un petit bâtiment quadrangulaire pourvu d’un étage et très probablement antérieur au couvent. Quelques vestiges (murs et lambeaux de sols) témoignant du parcellaire médiéval ont également été mis au jour dans la cour des provisions à l’occasion d’une fouille sédimentaire de faible ampleur. Les premiers bâtiments construits par les religieuses et conservés jusqu’à nous sont l’aile ouest, accueillant le chœur des religieuses dont les dispositions sont globalement conservées. Le premier étage, disparu au XIXe siècle à l’occasion de la création d’une voute au-dessus du chœur, conservait les vestiges de ces aménagements anciens, notamment une grande baie communicante depuis l’infirmerie vers le chœur de l’église. Les aménagements de l’étage, notamment la baie permettant de suivre l’office depuis l’infirmerie, ont également été retrouvés. L’aile sud est construite rapidement après l’aile ouest, probablement dans le cadre d’un même chantier, et relié ensuite au bâtiment sud-ouest par un mur. Son premier étage comprenait les cellules des religieuses, séparées par des cloisons en briques et ornées de sentences. Quelques-unes de ces dernières sont parvenues jusqu’à nous. Ce premier état du couvent est desservi par un unique escalier à l’articulation des deux ailes.


L’église est érigée à la fin du XVIIe siècle, selon un plan latin, et couverte de croisée d’ogives. Son plan à quatre travées, assez humble, suit en tout point les recommandations de l’ordre. Une crypte située sous l’église, et dont l’accès et une baie ont pu être retrouvés, n’était pas accessible lors de notre intervention. L’aile nord, moitié moins longue que l’aile sud du cloitre, est érigée à la suite de l’église. Elle accueille les sacristies et probablement les confessionnaux et est séparée en deux entre l’espace dévolu au prêtre et celui des religieuses. Un accès desservait le chœur de l’église depuis les sacristies masculines.


Le bâtiment ouest accueillant les sœurs tourières est intégralement repris entre la fin du XVIIe siècle et les premières décennies du XVIIIe siècle, pour lui donner sa forme actuelle. Il s’agit d’un imposant bâtiment se déployant sur quatre niveaux sans compter les combles. Un de ses principaux intérêts est son rôle d’interface avec le siècle, et le report dans son architecture même d’une clôture intérieure séparant l’espace. Deux ensembles de tours/parloirs ont pu être identifiés, le premier daté de la construction du bâtiment, le second du XIXe siècle. Le bâtiment comprend de nombreux espaces utilitaires : cuisines, chais, pressoir, mais aussi pharmacie.  La charpente à enrayure d’origine est toujours en place. Cette même période voit le bâtiment sud-ouest accueillant les latrines être largement repris, et un second escalier ajouté à l’aile sud. Le dédoublement des circulations permet de séparer l’utilitaire du liturgique au sein du couvent.


L’occupation laïque du bâtiment aura laissé relativement peu de traces dans le bâti, les religieuses auront probablement eu à cœur de retrouver les dispositions anciennes à leur retour. À l’inverse le XIXe siècle voit un grand nombre de modifications toucher le couvent. Ainsi le cloitre est fermé par la création de l’aile orientale, et la majorité des bâtiments est surélevée, en transformant les charpentes modernes (aile sud et ouest) ou en en créant de nouvelles (aile nord). De nouveaux bâtiments sont construits au sud-ouest du couvent. Le bâtiment ouest des sœurs tourières voit quant à lui ses circulations profondément transformées : disparition d’escalier, déplacement de la clôture, fermeture de l’accès carrossable à la cour des provisions. Exception faite des chantiers de la fin du XXe siècle et du début du XXIe siècle, c’est cet état qui nous est parvenu.


Malgré quelques difficultés à dater précisément chaque chantier, le couvent de la visitation de Thonon nous donne l’occasion de suivre l’évolution complète d’un couvent de religieuses de la contre-réforme depuis sa fondation jusqu’à nos jours. Son intérêt tient tant à sa presque totale conformité aux injonctions de l’ordre, qu’aux indices d’un chantier qui, même s’il s’étale sur plusieurs siècles, semble prévu dès l’origine et la fondation.


Commune : Thonon-les-Bains

Adresse/lieu-dit : Ancien couvent de la Visitation

Département/Canton : Haute-Savoie

Année de fouille : 2016

Période principale d'occupation : Période moderne

Responsable d'opération : Quentin ROCHET

Aménageur : Ville de Thonon-les-Bains

Raison de l'intervention : Création d'un pôle culturel

Type de chantier : Sédimentaire/Etude du bâti (Fouille préventive)