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Lyon - Vaise- ZAC Industrie Nord (Îlots 2- 3 et 5)


Depuis une vingtaine d’années, l’exploration archéologique de la partie nord de la plaine de Vaise dévoile des vestiges couvrant une large amplitude chronologique, allant de la préhistoire jusqu’à la fin de l’époque romaine. La construction d’habitation sur trois îlots en bordure de Saône a enclenché une fouille préventive sur une superficie cumulée atteignant presque un hectare. Cette opération vient renouveler la connaissance du secteur compris entre la colline de la Duchère et la Saône. L’étendue de la zone fouillée permet de cerner l’occupation sur toute la largeur de la plaine, de la rivière au contrefort de la colline.

Si les principales découvertes sont antiques, quelques structures d’époque néolithique (6000/2200 av. J.-C.) et de l’âge du Bronze (2200/800 av. J.-C.) ont été identifiées. L’occupation la plus ancienne correspond à un foyer néolithique à pierres chauffées, associé à quelques négatifs de poteau, ainsi qu’à un épandage de galets. Ces structures sont scellées par un niveau de colluvion chargé de mobilier du Néo final/Bronze Ancien, associé à des galets thermofractés. Plusieurs trous de poteau sont liés à cette nouvelle phase d’occupation, sans qu’il soit possible d’en déduire une organisation particulière. Deux épandages de galets et de mobilier céramiques ont également été fouillés. Ces vestiges sont malheureusement trop ténus pour en restituer la fonction.

La première occupation antique est caractérisée par le découpage du secteur en parcelles agricoles carrées, d’une largeur de 2 actus (71 m), réalisées au tout début du Ier s. apr. J.-C. Ces parcelles suivent un module similaire à celui employé pour le découpage des îlots d’habitation augustéens (240 pieds romains de long) de la colonie de Lyon. Dans chaque parcelle persistent les traces d’une exploitation agricole matérialisée par des négatifs de piquets en bois (palissade), ou de petits bâtiments agricoles en matériaux périssables. Le petit bâtiment observé sur l’ilot 2 est édifié sur solins de galets liés à la terre. Sa fouille a permis de reconnaître une préparation de sol, dans laquelle sont apparus des négatifs de poutres laissant penser à la présence d’un plancher occupant sa moitié septentrionale. Le mobilier associé à ce niveau de sol (céramique et monnaie) semble indiquer une mise en place dans la première moitié du Ier siècle apr. J.-C. Signalons qu’un bloc de granite (0,60 m de côté) apparaît dans cet horizon et pourrait correspondre à un système de bornage parcellaire installé le long du fossé (comblé dans la seconde moitié du IIe siècle) marquant la limite entre deux domaines : la villa du Pathé Vaise au sud, dont seuls les abords ont été dégagés ; au nord, la villa située à la pointe de la plaine de Vaise, au 25-29 rue Joannès Carret.

Dans le dernier tiers du Ier siècle, l’occupation agricole de la ZAC Industrie Nord évolue vers les berges de la Saône avec la mise en place d’un petit complexe portuaire desservi par une voie. Cette dernière traverse le site du nord-est au sud-ouest, perpendiculairement à la Saône. D’une largeur d’environ 7 m, elle est associée à une petite nécropole qui se poursuit vers le nord hors de l’emprise de fouille, comme l’atteste la découverte de nouvelles incinérations sur la parcelle 4. Cette voie devait se connecter à l’ouest à celle qui traverse la plaine de Vaise au pied du massif de la Duchère pour rejoindre Anse et le territoire Séquane. À l’est, elle se termine au niveau des berges, à l’emplacement d’un enrochement propice à la traversée de la Saône à gué. En bordure immédiate de la voie est installée une petite nécropole matérialisée par au moins trois tombes à incinération. Celles-ci livrent un riche mobilier qui permet de restituer deux phases d’occupation : une première au tout début du IIe siècle ; la seconde à la fin du IIe, début du IIIe siècle. Un petit four destiné à la préparation du pain et la cuisson des aliments est installé au centre de la nécropole.

Dans le secteur 3c, la berge de la Saône est stabilisée par l’érection d’une digue en bois caractérisée par de puissants poteaux installés dans des cavités chemisés en pierres et TCA. Cette digue retient une levée de terre artificielle se développant sur au moins 450 m² et dont les matériaux proviennent du creusement d’une grande fosse d’extraction située à proximité immédiate de la berge. Cette terrasse artificielle est destinée à recevoir un premier édifice maçonné construit dans le dernier tiers du Ier siècle et en grande partie détruit par les travaux postérieurs. Il se développait sur une superficie de 170 m² et livre les indices d’une activité métallurgique, sans doute pour le travail des alliages cuivreux, qui se déroulait dans sa partie orientale. Une latrine est associée à cet édifice et aménagée directement contre sa façade septentrionale, en bordure de la voie. Elle prend la forme d’un petit édifice, sans doute en terre et bois, qui pouvait contenir deux sièges installés au-dessus d’une fosse régulièrement curée. L’emplacement de la latrine F3548, à l’extérieur de l’édifice et en bordure d’une voie tendrait à démontrer son caractère tout au moins collectif, si ce n’est public. Elle devait sans doute être destinée aux occupants du complexe portuaire comme aux personnes de passages par le gué ou en débarquant depuis la rivière.

Le bâtiment 300 est rapidement reconstruit au tout début du IIe siècle, alors que la latrine F3589 est abandonnée. Un nouvel édifice est implanté en bordure de la digue et couvre une superficie de 90 m². La moitié occidentale du bâtiment 300 est toujours en fonctionnement à cette époque. Ce nouvel édifice présente un plan rectangulaire divisé en deux nefs au rez-de-chaussée par une série de bases maçonnées de pilier. L’espace interne est divisé en deux pièces ouvrant par de larges seuils sur la digue. Une cage d’escalier donne également sur cette digue et permettait de desservir au moins un étage dont la destination nous est inconnue (habitat ? Stockage ?). Ces espaces ont tout aussi bien pu jouer le rôle d’atelier artisanal (rappelons qu’une grande quantité de pâte de bœuf ont été retrouvées comme recharge de la voie en bordure de l’édifice) comme d’espace de stockage. Au sud, un second édifice (307) bâti selon les mêmes techniques vient compléter les aménagements dans le secteur. Situé en limite de fouille, il n’a pu être dégagé que sur une faible surface ne nous permettant de reconnaître son plan et sa destination. Entre les deux bâtiments, une cour est aménagée et dotée de structures hydrauliques qui participaient à une activité artisanale également indéterminée (textile ? vannerie ? pisciculture ? abreuvoir ?). Au tout début du IIIe siècle, le complexe portuaire va être partiellement reconstruit. La digue est soigneusement démontée et une maçonnerie associée à une pile vient délimiter la nouvelle limite de berge. Le débarcadère 305 va également être renforcé par la mise en place d’un sol en dalles de gneiss liées au mortier. En avant de cette digue, un chemin est aménagé, sans doute destiné à la circulation le long de la berge, peut-être en lien avec le halage des chalands ou le chargement/déchargement des marchandises. Il est fréquenté au moins jusqu’au Ve siècle.
Il semble que le port fluvial de la ZAC Industrie Nord puisse être rapproché, de par ses dimensions et la nature de ses aménagements, des ports privés qui pourrait appartenir à l’un des deux domaines situés à environ 500 m du complexe, ou aux deux domaines à la fois qui se seraient partagés les frais d’aménagements et d’entretien du port. En effet, la limite parcellaire observée au Ier siècle semble être conservée par le tracé de la voie au IIe et IIIe siècle. Même si la digue et les entrepôts sont installés au sud de cette voie et sembleraient plutôt liés à la villa du Pathé Vaise, ils pouvaient également être utilisés par le dominus installé dans la villa de la rue Joannès Carret. Quoi qu’il en soit, on assiste à partir de la fin du Ier siècle à une diversification des revenus commerciaux de ces domaines qui passent par l’édification d’un port destiné à vendre les marchandises produites, mais également par le contrôle du passage à gué.
 
Enfin, signalons la découverte d’une inhumation a également été mise au jour en bordure de l’entrepôt. Le corps d’un jeune homme semblait avoir été jeté au fond d’une fosse et le squelette présente des traces violentes de coups à la tête donnés par un objet tranchant (épée ?). La datation C14 donne une fourchette entre la fin du IIe et le début du IIIe siècle.



Revue de presse :

  • Le Progrès 2016 , " Le chantier d'Archeodunum continue de livrer ses secrets ", Le Progrès. (12/03/2016)

Commune : Lyon

Adresse/lieu-dit : Vaise- ZAC Industrie Nord (Îlots 2- 3 et 5)

Département/Canton : Rhône

Année de fouille : 2016

Période principale d'occupation : Antiquité

Autres périodes représentées : Néolithique,Age du Bronze

Responsable d'opération : Benjamin CLEMENT

Aménageur : SERL

Raison de l'intervention : Construction de logements/projet immobilier

Type de chantier : Sédimentaire (Fouille préventive)


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