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Avignon - Palais des Papes - Plancher de la tour de la Campane


L'étude d'un plancher du XIVe siècle

Le Palais des Papes d’Avignon est un édifice très imposant érigé sur le versant méridional du rocher des Doms. Sa construction débuta en 1316 sur les murs de l’ancien palais épiscopal où Jean XXII (1316-1334) avait élu résidence, elle concerna surtout des réaménagements de l’ancienne demeure des évêques et, en 1319, la construction d’un nouveau corps de bâtiment destiné à exercer la justice de l’Église. C’est sous Benoît XII (1334-1342) que les bases d’un nouveau palais furent lancées, concrétisant ainsi dans la pierre le souhait pour la papauté de s’ancrer durablement à Avignon. La tour de la Campane fut bâtie durant ce pontificat dans un vaste projet de modification des bâtiments situés autour du cloître. Elle se dresse dans l’angle nord-ouest du Palais à côté de la cathédrale Notre-Dame, avec ses 45 m de haut. Ses murs épais de 3 m délimitent un plan rectangulaire de 14,94 m par 12,80 m qui s’articule entre l’angle de l’aile occidentale et la chapelle Saint-Jean. Son élévation se subdivise en cinq niveaux. Le rez-de-chaussée est couvert d’une voûte d’arêtes, les deux niveaux suivants sont planchéiés et les deux derniers niveaux sont voûtés sur croisée d’ogives. Les deux planchers de la tour furent construits selon le même principe technique. Celui sur lequel porte cette étude sépare le niveau 3 de la tour, désigné salle Pintat et le niveau 4, dite salle des Hospices. Il a subi peu de modifications à l’exception de l’angle sud/est endommagé par les infiltrations d’eau. Il conserve en effet sa structure de charpente d’origine ainsi que son sol de pierre posé sur mousse, ce qui est exceptionnel. Généralement, les pièces de bois des planchers des édifices érigés durant la papauté avignonnaise ont été renforcées de barres de fer et les sols ont été entièrement refaits, même s’ils réutilisent parfois d’anciens matériaux.

Le plancher de la tour de la Campane est en bois de résineux. Plusieurs de ses poutres et de ses solives conservent des fragments de liens de radeau. Ces éléments attestent que le bois d’œuvre utilisé pour sa construction a été acheminé par flottage sur le Rhône. On sait en effet que la cour pontificale faisait venir pour ces nombreux chantiers du bois des forêts alpines et notamment de Seyssel en Haute-Savoie.

Le plancher, qui se développe sur 1,15 m de haut, fut construit à partir d’une structure à trois systèmes, c’est-à-dire qu’il se compose de deux rangs de poutres et d’un solivage, chaque niveau se superposant orthogonalement.
Les extrémités de la poutre principale et des poutres du second système sont ancrées dans la maçonnerie tout en prenant appui sur des consoles de pierre. Il est intéressant de noter à cet égard que le scellement et la pose des poutres ont fait l’objet d’un aménagement particulier qui a consisté à disposer entre l’extrémité des poutres et la maçonnerie des planches formant en quelque sorte un coffrage. Ce boîtier de scellement a probablement pour fonction d’isoler les poutres de l’humidité contenue dans la maçonnerie. Cette hypothèse est confortée par le fait que les planches ont été débitées dans du chêne, une essence de bois particulièrement résistante en contexte humide.
L’observation de l’extrémité des poutres a aussi été l’occasion de remarquer que ces dernières ont été scellées avec le même mortier que celui employé pour l’appareil de pierre, ce qui indique de façon évidente qu’elles furent installées en même temps que les maçons bâtissaient les murs. L’importance de protéger les bois de la maçonnerie était d’autant plus utile, puisque les poutres ont été ancrées dans un mur fraichement bâti et gardant toute son humidité ce qui ne se produit pas lorsque les poutres sont installées après coup dans des murs secs.



Commune : Avignon

Adresse/lieu-dit : Palais des Papes - Plancher de la tour de la Campane

Département/Canton : Vaucluse

Année de fouille : 2015

Période principale d'occupation : Moyen Âge

Responsable d'opération : Emilien BOUTICOURT

Aménageur : Conseil général du Vaucluse

Raison de l'intervention : Restauration/Réhabilitation d'un bâtiment historique

Type de chantier : Etude du bâti (Fouille préventive)