Dardilly - Groupe scolaire
L’opération d’archéologie préventive menée à Dardilly préalablement à la construction d’un nouveau groupe scolaire avenue de Verdun, a concerné une emprise de 2000 m² implantée sur le passage d’un tronçon enterré de l’aqueduc antique de la Brévenne situé à une quinzaine de kilomètres de son arrivée sur la colline de Fourvière à Lyon. Cette fouille a également offert la possibilité de mettre en évidence les vestiges de structures liées au fonctionnement et à l’entretien de l’aqueduc, de repérer des indices d’une fréquentation antique postérieure à l’abandon de l’édifice et d’identifier, par ailleurs, plusieurs structures appartenant à un site d’occupation rurale de l’époque médiévale dont la datation se situe entre le Xe et le XIe siècle.
Le canal de l’aqueduc, dont la voûte n’était pas conservée à l’exception de quelques éléments, a été mis au jour sur une longueur de 64 m selon une orientation générale sensiblement ouest-est, accomplissant néanmoins deux changements d’orientation. La pente moyenne relevée sur ce tronçon est de 0,8‰, mais le profil en long montre de nombreuses variations dont la plus significative est représentée par une contre-pente de 0,3‰ sur les quinze premiers mètres du specus à l’ouest. L’ouvrage est enfoui dans une vaste tranchée et flanqué d’un drain latéral sur le côté amont du versant. Le canal est structuré avec la combinaison de plusieurs maçonneries, comprenant un radier de fondation, des piédroits, un cuvelage, un dispositif d’étanchéité et une voûte. Cette mise en œuvre est conforme à la structure dite de « grande section » identifiée et reconnue à de nombreuses reprises à partir du dix-huitième kilomètre de l’aqueduc. Cependant, une technique inhabituelle a pu être observée pour la mise en œuvre de la paroi gauche du cuvelage sur le dernier tiers de la longueur du canal étudié. Celle-ci est, en effet, exclusivement réalisée avec des fragments de briques et des fragments d’imbrices liés avec du mortier de tuileau. Les observations ont été effectuées sur une coupe de l’ouvrage et par l’intermédiaire de l’identification en amont d’une césure régulière avec la paroi du cuvelage construite de manière classique en béton banché, montrant d’une part, que la mise en œuvre de cette technique n’est pas liée à une réparation du canal et permettant d’autre part, de considérer de manière significative une phase du chantier de construction.
Le colmatage du canal, mis en place dès l’arrêt de la circulation active d’eau, est matérialisé par le dépôt d’une couche d’une cinquantaine de centimètres d’épaisseur composée d’une alternance de litages fins de sable et d’argile silteuse. L’analyse par luminescence optiquement stimulée (OSL) d’un échantillon de sédiments prélevés au cœur de cette couche fournit une datation à 1660 ± 80 ans BP, soit entre la fin du IIIe s. et le début du Ve s. Ces premiers dépôts étaient surmontés par une couche homogène de silt argileux contenant de nombreux fragments de grès et de mortiers dont la présence s’explique par le démantèlement de la voûte et la récupération de ses matériaux.
L’absence de la voûte à l’instant de la mise en place de cette couche semble confirmée par la découverte de restes osseux d’un bovin adulte, de quelques fragments d’os humains et de plusieurs fragments de céramique appartenant à une coupe en sigillée claire B Desbat 15 et à une marmite en céramique commune grise dont l’association est fréquente dans des ensembles du IIIe s. et du début du IVe s. Le comblement complet du canal apparaît sous la forme de deux couches, d’une épaisseur totale de 0,75 m, caractérisées elles aussi par la présence de fragments de grès et de mortier. La dernière couche, qui recouvrait partiellement le niveau d’apparition des piédroits, a livré deux fragments d’une assiette en céramique décorées, dont la production date des XVIe - XVIIe siècles.
Deux drains contemporains de l’aqueduc et aménagés perpendiculairement au côté sud de l’édifice ont été découverts à 35 m d’intervalle. Le premier à l’ouest, a été identifié sur une longueur de 19 m et possède un creusement en Y de 1,93 m de profondeur s’amenuisant progressivement avec l’abaissement de la pente. Il était comblé avec des blocs pluridécimétriques de calcaire à gryphées et un conduit sommaire a été aménagé au fond avec les mêmes blocs. À l’est, le second fossé, dont la relation à l’aqueduc a été perturbée par le creusement d’une fosse, possédait également un creusement en Y observé jusqu’à 1,10 m de profondeur et un remplissage avec des blocs de grès hétérométriques dans sa partie inférieure. Une couche du comblement de la partie supérieure du fossé a livré un fragment de pot à col côtelé dont la typologie est répandue entre l’époque augustéenne et le IIIe s.
Une fosse sub-quadrangulaire d’environ 3,90 m de long et 3,50 m à 4,50 m de large a été découverte contre le côté droit de l’aqueduc. Elle possédait un creusement conservé sur 0,85 m de profondeur caractérisé de manière générale par un fond plat et des parois sub-verticales. Des radiers de pierres étaient aménagés dans deux logettes quadrangulaires de 0,45 m à 0,60 m de côté, creusées dans les angles en vis-à-vis sur le côté sud de la fosse, constituant des aménagements propices à l’installation d’une superstructure. L’interprétation de la fonction de cette fosse est due à l’analyse micromorphologique d’un échantillon sédimentaire prélevé dans la partie inférieure du comblement au contact du substrat et suggère que cette fosse a été employée pour gâcher du mortier à la chaux.
L’occupation médiévale identifiée dans l’emprise de la fouille est représentée par sept structures comprenant un foyer et six fosses-silos. Excepté le foyer et une fosse, situés respectivement au sud et à l’ouest, les fosses-silos étaient toutes situées au nord de l’emprise de fouille, incitant à penser que l’occupation devait se développer au-delà vers le nord. L’ensemble céramique issu de ces différents comblements indique une occupation du site entre le Xe et le XIe siècle, notamment avec la présence des fonds marqués, une particularité régionale admise pour cette période.
Une étude carpologique réalisée sur quatorze prélèvements issus du comblement des fosses-silos a permis d’obtenir des informations sur l’économie végétale, l’agriculture, le paysage ancien et les activités humaines pratiquées sur le site. En parallèle, une étude anthracologique effectuée sur six prélèvements recueillis dans le foyer et dans quatre silos a permis d’esquisser certains traits des paléo-paysages environnants et de dégager des considérations d’ordre ethnographique sur l’usage du bois.
Commune : Dardilly
Adresse/lieu-dit : Groupe scolaire
Département/Canton : Rhône
Année de fouille : 2023
Période principale d'occupation : Antiquité
Autres périodes représentées : Moyen Âge
Responsable d'opération : David BALDASSARI
Aménageur : Commune de Dardilly
Raison de l'intervention : Construction d'un groupe scolaire
Type de chantier : Sédimentaire (Fouille préventive)
Dardilly, avenue de Verdun : un tronçon de l’aqueduc de la Brévenne