Étude archéologique du bâti après décroutage des enduits.

Quoi de neuf à Ainay-le-Vieil ?

Quoi de neuf à Ainay-le-Vieil ?

Archéologie et restaurations au château

Depuis janvier 2020, une partie du château d’Ainay-le-Vieil (Cher) fait l’objet d’une importante campagne de restaurations.  A la demande et grâce à une aide financière de la Conservation régionale des monuments historiques, ces travaux sont accompagnés d’une étude archéologique du bâti. Il s’agit de retracer les techniques de construction du château médiéval et du logis de la Renaissance, en mettant en évidence les transformations de ces deux édifices au fil des siècles. Les résultats, très riches, apportent de nouvelles connaissances sur le système défensif du château, la datation du logis et son ornementation.

Angle nord-est du château. Le logis de la Renaissance est enveloppé d’échafaudages.
Angle nord-est du château. Le logis de la Renaissance est enveloppé d’échafaudages.

Un château au plan octogonal

Le château d’Ainay-le-Vieil est communément daté du XIIIe siècle par son architecture dite « capétienne ». Il se compose de murs de courtine crénelés d’environ 11 m de haut dessinant un plan octogonal. Neuf tours d’environ 15 m de haut, au plan généralement semi-circulaire, se dressent à la jonction de ces portions d’enceinte. Deux tours encadrent la porte d’accès au château, accessible aujourd’hui par un pont en pierre qui enjambe les douves remplies d’eau. À l’angle nord-est, on observe une configuration spécifique, avec une tour circulaire qui relie deux courtines formant un angle droit. C’est à cet endroit qu’un logis composé de deux corps de bâtiments et d’une tour d’escalier a été construit à la Renaissance.

Plan du château médiéval et du logis.
Plan du château médiéval et du logis.
Façade nord du logis de la Renaissance aménagée dans la courtine médiévale. Vue de l’extérieur, après restauration.
Façade nord du logis de la Renaissance aménagée dans la courtine médiévale. Vue de l’extérieur, après restauration.

Un vaste programme de restaurations

Les restaurations amorcées en 2020 ont spécifiquement concerné les parements extérieurs du logis de la Renaissance, ainsi que sa charpente. Trois tours et quatre courtines ont été impactées par ces travaux. Au XIXe ou au XXe siècle, l’ensemble des parements a été recouvert d’un enduit gravillonneux qui présentait des décollements importants. Il a donc été décidé de purger cet enduit et d’en réaliser un nouveau. Grâce au décroutage qui a mis à nu les murs, Camille Collomb et ses collaboratrices ont eu l’opportunité d’expertiser l’ensemble des maçonneries médiévales, d’en étudier les détails de la construction et de proposer des restitutions du château ancien.

Tour nord-est : créneau transformé en fenêtre et partie haute d’une archère.
Tour nord-est : créneau transformé en fenêtre et partie haute d’une archère.

Créneaux, archères et hourds : un château médiéval bien protégé

Tout d’abord, l’étude a révélé que, à l’instar des courtines, les tours étaient à l’origine crénelées. Ce n’est qu’après le Moyen Âge que certains créneaux ont été transformés en fenêtres, et d’autres simplement murés.
Les tours et, occasionnellement, les courtines, étaient également pourvues de hautes archères, réparties sur deux niveaux (en bas et en haut des murs). Pour les tours, chaque niveau se caractérisait par trois archères dont le plan de tir permettait de protéger les abords du château. Avec l’introduction des armes à feu, à partir du XIVe siècle, les fentes de tir du niveau inférieur ont été transformées en canonnières.
Enfin, l’étude archéologique a révélé que les tours étaient pourvues de hourds, véritables galeries en bois positionnées en surplomb des murs pour permettre de défendre les abords du château. La restitution des hourds repose sur l’identification des trous d’ancrage des poutres.

Hourds
Dessin de restitution d’un hourd (E.‑E. VIOLLET-LE-DUC, Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, tome 6, p. 139).
Angle nord-est du château : charpente de la tour et du logis.
Angle nord-est du château : charpente de la tour et du logis.

1502 : la datation précise de la charpente du logis

Le logis en appui contre les murs de l’enceinte médiévale est pourvu, dès l’origine, d’une charpente à chevrons formant ferme. Une datation dendrochronologique (Ch. Perrault, C.E.D.R.E.) révèle que les arbres ont été abattus en 1502. Grâce à ces informations, on peut donc placer avec certitude la construction du logis entre l’extrême fin du XVe et le début du XVIe siècle.

Créatures imaginaires sculptées en façade de l’escalier d’honneur.
Créatures imaginaires sculptées en façade de l’escalier d’honneur.
Aile nord du logis avec sa façade agrémentée de sculptures.
Aile nord du logis avec sa façade agrémentée de sculptures.
Au sommet d’une lucarne : sculpture de singe enchaîné.
Au sommet d’une lucarne : sculpture de singe enchaîné.

De fantastiques ornements

Les façades du logis se caractérisent par de nombreux ornements. L’alternance entre des assises de pierres de taille et des bandes enduites confère un rythme horizontal à l’ensemble, équilibré par les moulurations des fenêtres. Surtout, les façades possèdent une grande quantité de sculptures dont l’ensemble est représentatif de l’époque de la construction. L’escalier d’honneur est particulièrement foisonnant avec des sculptures en bas-relief représentant une végétation peuplée de créatures fantastiques.

Un point central de l’archéologie du bâti : la coactivité entre les différents corps de métier

Lors des chantiers de restauration, différents corps de métier travaillent en parallèle : maçons, tailleurs de pierre, charpentiers, couvreurs ou peintres. Cette coactivité donne lieu à des rencontres propices aux échanges de savoir-faire. Pour les archéologues, ces partages sont riches car ils permettent de confronter les pratiques actuelles des artisans avec les traces laissées par les bâtisseurs depuis le Moyen Âge. Le dialogue autour des découvertes peut également entraîner la modification du projet de restauration par les architectes, afin d’intégrer les résultats de l’étude archéologique. C’est le cas à Ainay-le-Vieil, où la présence des hourds en haut des tours a été matérialisée par des pièces de bois de section carrée placées dans chacun des trous d’ancrage.

Étude archéologique du bâti après décroutage des enduits.
Étude archéologique du bâti après décroutage des enduits.

Et après ?

Les archéologues achèvent leur mission bien avant les autres corps de métier. Une fois le chantier de restauration achevé (printemps 2022), les échafaudages sont déposés et les parements, comme neufs, sont de nouveau visibles par tous. De son côté, l’équipe archéologique s’applique à analyser les échantillons, à compiler la documentation et à rédiger un rapport d’étude qui rassemble la totalité des résultats obtenus sur le terrain. Ces nouvelles données enrichissent considérablement les connaissances sur le château et seront directement transmises au public lors des visites guidées.

Opération d’archéologie du bâti conduite entre 2020 et 2022 sur la commune d’Ainay-le-Vieil, en accompagnement du chantier de restauration du château.

Prescription et accompagnement financier : Conservation régionale des monuments historiques.

Maîtrise d’ouvrage : SCI du château d’Ainay-le-Vieil

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Camille Collomb)