Fig. 7 : Les cinq torques de l’âge du Bronze ancien.

A Tomblaine, les colliers sont éternels

A Tomblaine, les colliers sont éternels

Découvertes des âges du Bronze et du Fer dans le bassin de Nancy

Au cours de l’automne 2020, Archeodunum a réalisé une fouille archéologique au lieu-dit « Bois la Dame », sur la commune de Tomblaine (54). Cette opération, prescrite par le Service régional de l’archéologie de Grand Est, était motivée par l’extension de la ZAC « Bois la Dame », pilotée par la société SOLOREM. Sur 30 000 m², Amaury Collet et son équipe ont exploré des vestiges des âges des Métaux, au cours des deux derniers millénaires avant J.-C.

Aux portes de Nancy, un riche environnement archéologique

Le site est localisé à l’est de Nancy, non loin du plateau de Malzéville et du Pain de Sucre. Le contexte archéologique est riche, avec en particulier des sites des âges du Bronze et du Fer, contemporains de ceux trouvés ici.

XIXe – XXe siècles : des drains, des puits, des arbres

Nos archéologues ont commencé la fouille en retirant la terre végétale à l’aide de pelles mécaniques. Au-dessous, ils ont découvert de nombreuses traces de la mise en valeur des terres agricoles entre le XIXe et le XXe siècle. Trois réseaux de drains en terre cuite strient toute la zone (fig. 1-2). Plusieurs puits et des fosses de plantations d’arbres rappellent la présence de jardins ouvriers, créés dans les années 1960.
C’est au milieu de toutes ces traces que se nichent des vestiges nettement plus anciens, puisqu’ils datent des deux derniers millénaires avant J.-C.

 

Fig. 1 : Plan général des vestiges sur vue aérienne (fond © Google Earth)
Fig. 1 : Plan général des vestiges sur vue aérienne (fond © Google Earth)
Fig. 2 : Drains récents.
Fig. 2 : Drains récents.
Fig. 3 : Vestiges des trois bâtiments superposés.
Fig. 3 : Vestiges des trois bâtiments superposés.
Fig. 4 : Plan des trois bâtiments superposés.
Fig. 4 : Plan des trois bâtiments superposés.

IIIe – Ier siècles av. J.-C. : agriculture gauloise

A l’instar des traces plus récentes, ce sont des indices d’exploitation agricole qui émergent. Le sud du site est ainsi parcouru par une série de fossés peu profonds, probables limites de champs ou d’enclos. Ils signalent la proximité d’une ferme des derniers siècles avant J.-C., repérée lors d’une fouille voisine en 2012.

VIe – Ve siècles av. J.-C. : de l’architecture et des poubelles gauloises

La destination agricole des lieux s’ancre dans un passé plus ancien encore. L’équipe a ainsi découvert des éléments architecturaux datés du milieu du premier millénaire avant J.-C. – une période encore mal connue dans la région. Au sud de la fouille, des bâtiments se sont succédé au même emplacement. Leur architecture recourt à des poteaux ancrés dans le sol, dont seuls les emplacements ont été reconnus (fig. 3). Nos archéologues pensent reconnaître trois constructions : deux habitations de 12 à 20 m², et un grenier de 5 m² (fig. 4).
Dans l’environnement de ces bâtiments, trois grandes fosses aux formes irrégulières ont été creusés pour extraire de l’argile – peut-être destinée à la construction (fig. 5). Elles ont ensuite servi de dépotoirs. Dans leur remplissage, toute sorte de déchets qui reflètent la vie domestique – et qui font le bonheur des archéologues : restes de foyer, vases brisés, fragments de meules, ossements animaux (fig. 6).

 

Fig. 5 : Fosse complexe en cours de fouille.
Fig. 5 : Fosse complexe en cours de fouille.
Fig. 6 : Fragments de poterie dans une fosse.
Fig. 6 : Fragments de poterie dans une fosse.

Début du 2e millénaire av. J.-C. : cinq colliers pour un dépôt mystérieux

C’est au sud-est de la fouille qu’Amaury et son équipe ont découvert un lot exceptionnel de cinq colliers en bronze. Ces tours de cou, ou « torques », étaient soigneusement empilés du plus grand au plus petit (fig. 7). Ils sont faits d’un jonc rigide, ouvert, dont les extrémités sont repliées. Leur forme, très courante, permet de les dater à l’âge du Bronze ancien, entre 2000 et 1600 avant J.-C.

Quant à la raison de leur enfouissement, elle reste énigmatique. Les colliers de ce type ont été souvent trouvés dans des tombes, mais telle n’est pas la situation ici. Les autres hypothèses fréquemment avancées par les archéologues sont le stockage de métal en vue de le refondre, des cachettes de marchands, des trésors associés à une personne particulière, ou encore des dépôts rituels.

Fig. 7 : Les cinq torques de l’âge du Bronze ancien.
Fig. 7 : Les cinq torques de l’âge du Bronze ancien.

Et après ?

À l’issue du chantier, la société SOLOREM a repris possession des lieux pour la suite de l’aménagement de la ZAC « Bois la Dame ». Côté archéologie, nos experts étudieront l’ensemble des données recueillies (photos, dessins, objets, etc.) afin de comprendre au mieux comment on a vécu dans ce secteur du bassin de Nancy durant les derniers millénaires avant J.-C. Tous les résultats seront synthétisés dans un rapport de fouille abondamment documenté.

Quant aux cinq colliers métalliques, ils ont été envoyés dans un laboratoire spécialisé. Ils y seront nettoyés et stabilisés, en vue d’une conservation optimale. Les bijoux sont éternels, ou c’est du moins à quoi s’emploient les archéologues et les services de l’Etat.

Opération d’archéologie préventive conduite en automne 2020 sur la commune de Tomblaine,
au lieu-dit « Bois la Dame », en préalable à l’extension d’une ZAC.

Prescription et contrôle scientifique : Service Régional de l’Archéologie de Grand-Est

Maîtrise d’ouvrage : SOLOREM

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Amaury Collet)

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