Du Néolithique à l’âge du Fer aux Mureaux

Vue du site au drone depuis l'ouest
Branche sud de l'enclos Second âge du Fer niveau
Enclos funéraire âge du Bronze avec au centre une sépulture secondaire à crémation
Petit bâtiment circulaire du Néolithique moyen
Grand bâtiment circulaire du Néolithique moyen

Etablissement rural du Second âge du Fer et habitat du Néolithique moyen aux Mureaux (Yvelines)

Aux Mureaux, préalablement aux travaux d’extension de la station d’épuration de la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise, une équipe d’archéologue de la société Archeodunum a réalisé une fouille archéologique préventive du 27 février au 5 mai 2017. Cette opération portait sur une surface de 15000 m² prescrite par le Service régional de l’archéologie (Drac Île-de-France) suite à un diagnostic mené par le Service Archéologique Départemental des Yvelines en 2015, ce dernier ayant notamment révélé la présence de structures et d’artefacts en rapport avec un probable établissement rural du Second âge du Fer. Le décapage extensif du site a permis de découvrir, outre ces vestiges, les traces d’une occupation du début du Néolithique moyen caractérisée par la présence exceptionnelle de deux bâtiments circulaires.

Le Néolithique

C’est dans la partie centrale de l’emprise, localisée sur la bordure de la plaine de Flins en surplomb de la rive gauche de la Seine, que s’installe l’habitat du début du Néolithique moyen (vers 4500 avant notre ère) matérialisé par les vestiges des deux bâtiments circulaires à proximité desquels se développent des fosses, plusieurs palissades ainsi qu’un four à pierres chauffées probablement contemporain. Le premier bâtiment, qui mesure 7 m de diamètre, est constitué sur son flanc ouest d’un demi-cercle formé de 16 petits trous de poteaux auquel répond en symétrie un trou de poteau de dimensions plus importantes, tandis que deux tranchées alignées recevant des poteaux scindent l’espace interne en deux aires inégales d’environ deux tiers et un tiers de la surface. Le second bâtiment est bien plus imposant puisqu’il atteint près de 15 m de diamètre : la construction fait ici intervenir d’une part une tranchée hémicirculaire recevant des poteaux qui délimite la partie ouest du bâtiment, et d’autre part un demi-cercle formé de 6 trous de poteaux qui ferment l’espace à l’est, tandis que deux tranchées alignées recevant des poteaux scindent l’espace interne suivant le même principe que pour le premier bâtiment. Moins d’une vingtaine de constructions de ce type sont connues en France, essentiellement dans le Bassin parisien. L’identification de deux habitations circulaires sur le site de la station d’épuration des Mureaux s’avère donc précieuse pour l’analyse de cette forme d’habitat du milieu du Vᵉ millénaire avant notre ère qui semble succéder aux grandes habitations de modèle danubien du Néolithique ancien.

S’ajoute à cet ensemble une série importante de fosses se développant dans la partie septentrionale de l’emprise, à proximité de la Seine, qui pourrait correspondre à une fréquentation des rives du fleuve durant le Néolithique final (entre 3500 et 2200 avant notre ère), datation à confirmer par carbone 14.

La Protohistoire

D’après le mobilier céramique recueilli dans plusieurs structures, la fréquentation du site semble se poursuivre durant l’âge du Bronze (entre 2200 et 800 avant notre ère), notamment au cours du Bronze final. C’est probablement à cette période que se situe l’édification d’un petit enclos funéraire ovoïde de 5,5 x 4,5 m de diamètre, localisé à l’extrémité méridionale de l’emprise, qui abritait en son centre une sépulture secondaire à crémation en pleine terre. Une datation carbone 14 sur les ossements brûlés recueillis permettra de caler avec plus de précision la période d’édification de ce monument funéraire isolé.

Les vestiges protohistoriques les plus significatifs datent du Second âge du Fer (entre 500 et 50 avant notre ère) et se développent sur l’ensemble de la partie méridionale du site. Les différents aménagements repérés (trous de poteaux, fosses, foyers, fossés) semblent se rattacher à un établissement rural fréquenté d’après le mobilier recueilli entre La Tène ancienne et le début de La Tène finale. Un grand enclos rectangulaire d’orientation nord-est/sud-ouest (partiellement hors emprise) est délimité par un fossé mesurant plus de 50 m de long d’est en ouest pour 45 m de long du nord au sud. Ce fossé est interrompu sur ses côtés nord et sud afin de ménager des entrées de 3,5 m de large, et il présente la particularité d’être resté ouvert au nord et au sud tandis que son segment oriental, plus modeste, semble avoir été palissadé. Plusieurs exemples de recoupements de structures fossoyés par le fossé de l’enclos pourraient témoigner de la création de ce dernier lors d’une restructuration de l’établissement rural, tandis que le mobilier recueilli dans son remplissage suggère qu’il a été comblé avant l’abandon définitif du site, probablement durant La Tène moyenne. L’espace interne de l’enclos est occupé par au moins six bâtiments sur poteaux qui appartiennent à au moins deux phases de construction successives d’après les recoupements observés. On distingue notamment deux grands bâtiments de plan quadrangulaire complexe occupant 30 et 64 m² de surface au sol, interprétés comme des unités domestiques, tandis que les autres bâtiments pourraient correspondre à des annexes agraires. Quatre autres bâtiments ont été mis au jour au nord de l’enclos, parmi lesquels deux greniers sur six poteaux ainsi qu’un grand bâtiment de plan quadrangulaire complexe. Ce dernier, qui a livré du mobilier céramique de La Tène finale (dont un fragment d’amphore), constitue à ce jour l’élément le plus tardif de l’occupation protohistorique du site.

Par la suite, seul un fossé isolé témoigne d’une fréquentation sporadique du site durant l’antiquité, avant qu’à l’époque moderne le terrain ne fasse l’objet d’une mise en culture avec le creusement de fosses de plantations et de fossés parcellaires.

Les découvertes effectuées sur le site de la station d’épuration des Mureaux permettent d’apporter nombre de données inédites concernant les occupations néolithiques et protohistoriques des rives de la Seine dans le département des Yvelines. Les études actuellement en cours permettront notamment de déterminer avec plus de précision les différentes périodes d’occupation du site et le phasage de l’établissement rural du Second âge du Fer.

Amaury Collet