Archives de catégorie : Antiquité

Bon Baisers d’Autun, Archeodunum dans la saison 2 de Mission Archéo !

Bon Baisers d’Autun

Archeodunum dans la saison 2 de Mission Archéo !

Après un épisode consacré à notre chantier de Nort-sur-Erdre, Archeodunum a une nouvelle fois accueilli l’équipe de Passé Sauvage sur un de ses chantiers. Cette vidéo ouvre la deuxième saison de la série « Mission Archéo », et nous en sommes très heureux.

Les enjeux et les coulisses, bien réels, de notre opération au cœur d’Autun sont inscrites dans une enquête d’ « archéofiction », qui va irriguer toute la saison. Cette approche est un clin d’œil à Jean Rouch et à ses ethnofictions.

Archéologie à Bègues, un village multiséculaire

Archéologie à Bègues, un village multiséculaire

De l’architecture de bois aux murs en pierre

À l’automne 2022, une fouille archéologique s’est déroulée en périphérie du bourg de Bègues, en amont de la construction de maisons individuelles. L’opération a été réalisée par Archeodunum et le SAPDA (Service d’Archéologie Préventive du Département de l’Allier – CD03). Dans des conditions souvent brumeuses ou neigeuses, les archéologues ont découvert de nombreux vestiges témoignant du passé du village, depuis l’époque gauloise jusqu’au Moyen Âge (fig. 1 et 2).

 

Fig.1 : La brume et la neige ont souvent accompagné les archéologues.
Fig. 2 : Plan simplifié des vestiges.

Un village gaulois plus ancien qu’attendu

D’abord place forte gauloise (oppidum) puis agglomération gallo-romaine, le site de Bègues est connu de longue date et fait l’objet de nombreuses recherches. Pour autant, c’est la première fois qu’une fouille préventive est mise en oeuvre sur ce plateau qui domine les gorges de la Sioule (fig. 3).

Si aucun vestige du rempart de l’oppidum n’a été identifié, de nombreuses structures permettent de confirmer l’extension du village dans ce secteur du site. Des trous de poteau et vestiges de fondation témoignent de la présence de bâtiments en bois. En périphérie, des fosses-dépotoirs, un puits et un four de potier (fig. 4) nous renseignent sur les activités domestiques et artisanales pratiquées à la fin de la période gauloise (Ier s. av. J.-C.).

Fait remarquable, deux silos enterrés – initialement destinés au stockage des récoltes – ont livré de nombreux objets datés du IIIe s. av. J.-C. : c’est une période jusque-là inédite sur le site, ce qui permet d’envisager la naissance d’un habitat groupé antérieur à la création de l’oppidum.

Fig. 3 : Dégagement d’une fosse d’extraction, d’une cave et d’un four de potier. Les vestiges se distinguent très nettement sur le substrat rocheux.
Fig. 4 : Four de potier gaulois (ier s. av. J.-C.).

Un secteur périphérique de l’agglomération gallo-romaine

Durant l’Antiquité, l’occupation semble se rétracter sur cette partie du plateau. Peu nombreux, les vestiges gallo-romains ne correspondent pas à l’organisation structurée d’un habitat groupé. Un ancien chemin et deux petites carrières d’extraction de calcaire suggèrent que nous nous  situons en périphérie immédiate du village. Une cave (fig. 5), des fosses-dépotoirs et des trous de poteau de bâtiments matérialisent néanmoins quelques installations pérennes durant les Ier et IIe s. ap. J.-C.

Des souterrains taillés dans le rocher

Dans une zone particulièrement remaniée au fil du temps, Jérôme Besson et son équipe ont découvert un bâtiment semi-excavé gallo-romain, qui donnait accès à deux salles souterraines circulaires creusées dans un banc de calcaire particulièrement dur (fig. 6). D’une hauteur sous plafond de 1,50 m environ, ces deux salles communiquent par le biais d’un resserrement faisant office de porte. Tout porte à croire qu’il s’agit d’espaces destinés au stockage (fig. 7). Durant le haut Moyen Âge (VIIe – Xe siècles ap. J.-C.), le bâtiment est remanié et l’accès des caves souterraines est muré. Plus tard, une seconde entrée sera aménagée au nord au moyen d’un couloir à ciel ouvert taillé dans le calcaire. Cette modification d’accès fait supposer une utilisation de ces espaces souterrains sur un temps relativement long.

Fig. 5 : Dans une cave gallo-romaine, découverte d’un col d’amphore (ier s. ap. J.-C.).
Fig. 6 : Fouille au niveau de l’accès initial des galeries souterraines.

Des bâtiments médiévaux

Par la suite, ces caves sont abandonnées et la seconde entrée est bouchée. Deux bâtiments en pierre (fig. 8) sont construits durant le Moyen Âge (XIIIe – XIVe siècles). Ils disposent de pièces dallées et d’une cheminée. À proximité, plusieurs silos témoignent du maintien d’une activité de stockage.

Un riche patrimoine archéologique

Ces découvertes montrent une fois de plus la richesse du patrimoine archéologique de Bègues. Malgré une surface de fouille relativement restreinte (environ 1 500 m2), les différentes observations permettent d’esquisser l’évolution de l’extension du village au fil du temps, de périodes encore méconnues sur le site (début de la période gauloise) jusqu’au Moyen Âge.

Fig. 7 : Intérieur de l’une des salles souterraines. La morphologie de ces espaces a été documentée à l’aide de relevés laser.
Fig. 8 : Vue du bâti médiéval qui surmonte les anciennes galeries souterraines.

Opération d’archéologie préventive conduite en automne 2022 dans le bourg de Bègues (Allier), en préalable à la construction de logements.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie d’Auvergne-Rhône-Alpes.

Maîtrise d’ouvrage : Particulier

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Jérôme Besson) et Service d’Archéologie Préventive du Département de l’Allier.

Équipe de terrain

  • BESSON Jérôme* (RO)
  • LORPHELIN Auriane* (RA)
  • DIXON Kevin* (RA, SAPDA – CD03)
  • MARTIN Mathilde
  • CARBONE Antony
  • VALLEE Laurent
  • FLEURY Lara (SAPDA – CD03)
  • FAVART Claire (SAPDA – CD03)
  • BESSON Loriane* (SAPDA – CD03)
  • LABALME Maud* (SAPDA – CD03)
  • HEITZMANN Samantha (SAPDA – CD03)
  • GUILLAUD Lucas
  • KOWALSKI Jean-Baptiste (SAPDA – CD03)
  • CROCHAT Jessy (acquisition 3D)
    * Terrain et Post-Fouille

Équipe de post-fouille

  • LALLEMAND David (SAPDA – CD03)
  • LEPINE Guillaume
  • DUCREUX Aurélie
  • LEBLE Geoffrey
  • COLLOMB Camille
  • COLLOMBET Julien
  • FLOTTES Laurie
  • POLINSKI Alexandre
  • ALASCIA MORADO Marianne
  • CHAVOT Clément
  • CAMAGNE Géraldine
  • GILLES Amaury
  • PIGERON Olivier (Groupe Spéléologique Auvergnat)
  • CARAIRE Gabriel (Analyse Géophysique Conseil)

Six mètres sous terre. Archéologie au cœur du futur musée Panoptique à Autun

Six mètres sous terre

Archéologie et étude de bâti au cœur du futur musée Panoptique à Autun

Dans le cadre du projet d’aménagement du musée Panoptique d’Autun (71), les archéologues d’Archeodunum et du Service Archéologique de la Ville d’Autun ont uni leurs efforts pour explorer un espace charnière du futur musée. Dans ces 50 m2 situés au sein de l’hôtel Lacomme, deux mille ans d’histoire sont en cours d’étude, avec comme découverte majeure un tronçon très bien conservé du rempart urbain de l’Antiquité tardive (fig. 1).

 

Fig.1 : Un chantier complexe pour les archéologues et les entreprises chargées de sécuriser les lieux. Au premier plan à gauche, le rempart de l’Antiquité tardive.
Fig. 2 : Aile nord de l’hôtel Lacomme : cotes à atteindre et types d’intervention.

Entre murs et butons : un défi technique

L’objectif assigné aux archéologues est d’atteindre une cote de six mètres sous le sol actuel (fig. 2). Fouiller sur une telle profondeur à l’intérieur d’un Monument Historique n’est pas une mince affaire. Cela nécessite une haute technicité et un travail en collaboration avec de nombreux intervenants : maîtrises d’ouvrage et d’œuvre, cabinets d’études géotechnique et structure, entreprises en charge du confortement du bâtiment. Au fur et à mesure de la fouille, la stabilité du bâtiment a été assurée par des butons et des étais (fig. 1).

Au pied du mur : le rempart, marqueur du castrum de l’Antiquité tardive

Nous sommes au sud de la ville romaine d’Augustodunum/Autun, en marge du centre économique et politique de la capitale des Eduens. Au tournant des IIIe et IVe siècles, la ville se rétracte et se replie sur sa partie haute. Pour protéger cet espace, appelé castrum, un nouveau rempart vient barrer une partie resserrée de la fortification initiale de l’agglomération. Jessy Crochat et son équipe ont pu mettre au jour une portion de cet ouvrage, conservé sur une hauteur de plus de quatre mètres ! Épais d’environ trois mètres, il est fondé sur une à deux assises de blocs de grand appareil (fig. 3 et 4).

Fig. 3 : Des blocs de grand appareil forment la base du rempart (à gauche). Le géomorphologue fait un sondage à la tarière pour mieux comprendre la nature du terrain.
Fig. 4 : Angle nord-est de l’hôtel Lacomme : vue schématique des principaux vestiges.

Du castrum à la ville médiévale

Durant l’Antiquité tardive et le haut Moyen Âge, l’espace fouillé est hors des murs de la ville. Pour assurer une bonne défense, aucun bâtiment n’est construit contre le rempart. Seuls plusieurs niveaux de sol, et de nombreux rejets de céramiques et d’os d’animaux attestent d’une fréquentation régulière à cet endroit, situé à proximité d’une des portes majeures du castrum.

Durant l’époque carolingienne, des tours sont ajoutées contre le parement extérieur. Dans la zone explorée, un mur est peut-être à rattacher à ce remaniement (fig. 5). Le XIIe siècle voit une nouvelle modification des fortifications. Un rempart est édifié une cinquantaine de mètres en aval. Ayant perdu sa fonction d’origine, le mur du castrum sert de fondation à de nouveaux bâtiments. Donnant sur la rue des Bancs, une cave est installée contre le rempart (voir fig. 2). Plusieurs murs situés dans l’espace de la fouille correspondent également à cette réappropriation de l’espace urbain.

Fig. 5 : À gauche, mur d’une tour carolingienne (?), intégré à la fin du Moyen Âge dans une fosse maçonnée (à droite).
Fig. 6 : Écailles et arêtes de poissons. Largeur de l’amas, 5 cm.

Naissance et vie d’un hôtel particulier du XVe siècle

Construit dès le XVe siècle, l’hôtel Lacomme vient se substituer aux maisons médiévales. En vidant une fosse maçonnée, les archéologues ont découvert tout un ensemble de déchets culinaires (oiseaux, poissons, poteries, mortiers), dont l’analyse nous renseignera sur les menus de cette époque (fig. 5 et 6). Quant à l’analyse archéologique des murs, elle a mis en évidence de nombreux remaniements au XVIIe ou au XVIIIe s. (fig. 7).

Ensuite, l’espace a peu évolué jusqu’à la création du musée Rolin. Il est savoureux de noter qu’un aménagement muséographique avait entraîné le décaissement partiel de la salle étudiée ici. Un creusement qui a entamé le rempart du castrum, sans qu’on s’en soit rendu compte à l’époque !

Fig. 7 : Analyse du mur nord de l’hôtel Lacomme. Les informations sont enregistrées sur une tablette numérique.
Fig.8 : L’interruption du chantier est mise à profit pour engager les études spécialisées.

Une affaire à suivre…

Aujourd’hui, il reste encore plus d’un mètre à fouiller, mais le chantier a été interrompu (fig. 8). En effet, le bas de tous les murs de l’hôtel Lacomme a été atteint. Les acteurs en charge du projet sont en train d’élaborer une méthode de reprise en sous-œuvre permettant de répondre aux objectifs du projet architectural. Ces contraintes techniques nécessiteront d’adapter nos méthodes de fouilles : c’est la perspective d’un nouveau défi pour les archéologues. Alléchant !

Fig.9 :Vue générale : la prison panoptique (au centre), le palais de justice (à gauche) et les hôtels Lacomme et Rolin (à droite).

Opération d’archéologie préventive conduite en 2023 sur la commune d’Autun, dans l’angle nord-est de l’hôtel Lacomme, en vue de la création du musée Panoptique.

Prescription et contrôle scientifique : Service Régional de l’Archéologie de Bourgogne-Franche-Comté

Maîtrise d’ouvrage : Ville d’Autun

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Jessy Crochat) et le Service Archéologique de la Ville d’Autun

Équipe de terrain

  • BELOT Antoine* (SAVA)
  • COUDERC Clarisse (SAVA)
  • CROCHAT Jessy* (RO)
  • DESSOLIN Tristan (SAVA)
  • LABAUNE Yannick* (RA, SAVA)
  • LARATTE Sébastien* (géomorphologue)
  • LORPHELIN Auriane* (spécialiste du lapidaire)
  • RUET Charline* (gestionnaire du mobilier)
  • TISSERAND Angélique* (SAVA – topographe)
    * Terrain et Post-Fouille

Équipe de post-fouille

  • ALASCIA-MORADO Marianne (spécialiste du verre)
  • COLLOMBET Julien (numismate)
  • FLOTTES Laurie (anthracologue, carpologue)
  • GILLES Amaury (céramologue)
  • LABALME Maud (céramologue)
  • POLINSKI Alexandre (pétroarchéologue)

Des squelettes dans la cave : archéologie funéraire à Corbeil-Essonnes

Des squelettes dans la cave

Archéologie funéraire à Corbeil-Essonnes

Durant l’hiver 2023-2024, une équipe d’archéologues a mené une fouille dans la cave d’un pavillon du quartier Montconseil à Corbeil-Essonnes (fig. 1). Cette opération a été prescrite par le Service Régional de l’Archéologie d’Île-de-France. Elle fait suite à la découverte fortuite de squelette, alors que le propriétaire réalisait des travaux de rénovation dans son sous-sol. Les quatre pièces de la cave ont été fouillées, pour une surface de 52 m².

 

Fig.1 : Fouille d’une sépulture à l’aide d’un outillage spécialisé. Le contexte d’intervention a nécessité un éclairage artificiel.
Fig.2 : Plan des vestiges dans la cave.

Un cimetière mal connu

Ce propriétaire n’est pas le premier du quartier à faire une macabre découverte. La présence d’un cimetière du début du Moyen Âge dans ce secteur est connue depuis longtemps. Plusieurs sarcophages en plâtre, typiques de cette période, ont été découvert depuis le XIXe siècle. Les érudits ont alors supposé que ces inhumations étaient liées à la chapelle Notre-Dame-des-Champs, qui aurait été construite au VIIe siècle sur un temple païen honorant une source. Mais il ne subsiste aucune trace de ces constructions, et les sépultures de ce cimetière n’avaient jusque-là jamais pu faire l’objet d’une étude scientifique.

Des tombes bien rangées

La fouille a permis de découvrir 38 sépultures réparties dans les quatre pièces de la cave (fig. 2). Malgré plusieurs affleurements rocheux, les sépultures ont été disposées selon des rangées parallèles, qui ont perduré durant les sept siècles d’utilisation du cimetière, entre le IIIe et le Xe siècle après J.-C. Elles ont à peine été décalées vers l’est entre la fin de l’Antiquité et le début du Moyen Âge.

Fig.3 : Sépulture antique en cours de fouille. Si les planches ont disparu, des traces de bois et des clous permettent de restituer la manière dont les défunts ont été enterrés.
Fig.4 : Les tombes font l’objet d’un dessin minutieux

Des découvertes plus anciennes que prévu

Ce cimetière est plus ancien que ce que les érudits du XIXe siècles supposaient. Les premières inhumations datent de la fin de l’Antiquité. Cela prouve la vocation funéraire de ce secteur bien avant la construction de la chapelle. Durant le Bas-Empire, les défunts sont enterrés allongés, sur le dos, dans un coffrage en bois déposé dans une fosse profonde (fig. 3).

Des sarcophages mérovingiens

Au début du Moyen Âge, les pratiques funéraires évoluent. Les défunts sont désormais enterrés dans des sarcophages en plâtre. Cette pratique est très répandue en Île-de-France. Les cuves sont parfois ornées de décors sur les parois extérieures. À Corbeil, dix sarcophages ont été découverts (fig. 4). Aucun ne porte de décors, ils renferment tous un seul défunt – alors qu’il est courant d’en trouver plusieurs. Les sarcophages sont disposés côte à côte en « éventail » (fig. 5)

Fig.5 : Les sarcophages de la pièce 1 en cours de fouille.
Fig.6 : Croix et rosace gravées sur les deux faces d’un bloc recouvrant une tombe.

Une pierre singulière

L’un des sarcophages était surmonté d’un bloc de pierre tendre, taillé et sculpté. Ce bloc n’est pas complet et il est difficile de lui restituer sa forme d’origine. On peut toutefois distinguer une partie de rosace, tandis que la face opposée possède une croix latine et une croix inscrite dans un cercle (fig. 6). Ces motifs sont régulièrement présents sur les sarcophages en plâtre et évoquent le domaine funéraire, mais également les ornements qui peuvent figurer sur les façades des lieux de culte chrétiens.

Après la fouille

Les squelettes vont être analysés en laboratoire. Les spécialistes vont déterminer le sexe des individus, leur âge au décès et leurs conditions de vie. La position des ossements et du mobilier dans la tombe sera étudiée afin de préciser les gestes qui ont entouré la sépulture : comment est-elle constituée, comment le mort est-il déposé dans la fosse, y a-t-il eu des réouvertures ?

Plus généralement, l’objectif est de mieux connaître la population qui vivait ici durant l’Antiquité et le Moyen Âge, mais également de comprendre l’évolution des traditions funéraires au cours de ces périodes. Les résultats seront présentés dans un rapport de fouille abondamment documenté.

Opération d’archéologie préventive conduite à l’hiver 2024 sur la commune de Corbeil-Essonnes dans le quartier Montconseil, en préalable à la rénovation de la cave d’un pavillon particulier.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie d’Île-de-France

Maîtrise d’ouvrage : Particulier

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Clément Viau)

Équipe de terrain

  • Clément Viau* (RO)
  • Debborah Maguin
  • Annelise Juillard*
  • Marine Chesneau
  • Mylène Wasylyszn*
  • Guilhem Turgis
  • Sébastien Laratte
    * Terrain et Post-Fouille

Équipe de Post-fouille

  • Marion Legagneux
  • Maud Labalme
  • Clément Tournier
  • Julien Collombet
  • Pierre Cargouët
  • Auriane Lorphelin
  • Sandrine Swal
  • Clément Chavot
  • Gillian Filiz
  • Marie-José Ancel

Cercles et poteaux disparus : Il y a 2500 ans, une exploitation agricole à Chaniers

Cercles et poteaux disparus

Il y a 2500 ans, une exploitation agricole à Chaniers

Au printemps 2022, une équipe d’Archeodunum a mené une fouille archéologique à l’ouest de la commune de Chaniers (Charente-Maritime), aux abords du chemin de la Tonnelle. Cette opération, prescrite par le Service Régional de l’Archéologie, était motivée par un projet immobilier de la société SEMIS. L’emprise de fouille a couvert une surface de 1,5 hectare, où près de 400 vestiges ont été mis au jour (fig. 1), révélant un domaine agricole du premier millénaire avant J.-C.

 

Fig.1 : Vue générale du chantier.
Fig. 2 : Une empreinte de poteau avec ses pierres de calage.

Un site à trous

Le temps et l’érosion ayant eu raison des superstructures, des niveaux de sol et des foyers, Florent Ruzzu et son équipe ont essentiellement dégagé des empreintes de poteaux. Ces dernières sont bien conservées : elles sont profondément creusées dans le sol et contiennent pour la plupart les pierres qui calaient les poteaux en bois, aujourd’hui disparus (fig. 2). Ces trous dessinent des alignements, des plans d’édifices qui nous permettent de restituer l’organisation d’une vaste exploitation agricole, datant d’il y a près de 2500 ans (fin du premier et début du second âge du Fer ; fig. 3).

Fig. 3 : Plan général de l’établissement agricole vers 500 avant J.-C.
Fig. 4 : Détail d’un dispositif d’entrée. Dans une tranchée, on distingue les calages en pierre et les négatifs des poteaux.

Un enclos palissadé

Plus de 150 poteaux de section carrée clôturent une surface initiale d’au moins 4 500 m2, ensuite réduite à 3 000 m2. Dans sa dernière phase, le côté oriental semble avoir réutilisé des petits bâtiments. La clôture est percée de plusieurs entrées monumentales, suffisamment larges pour le passage de chars ou de charrettes. Elles sont encadrées par une paire de tranchées espacées de 1,80 m dans lesquelles sont installés des poteaux jointifs (fig. 4).

Des habitations circulaires

Le cœur de ce vaste espace est occupé par un bâtiment circulaire de 140 m2. Celui-ci se compose de trois rangées concentriques de poteaux, avec un accès au sud-est (fig. 5). L’édifice était construit sur ossature de bois, les murs étaient en terre crue et le toit probablement en chaume. Mal conservée, une seconde maison circulaire, plus petite, existe probablement au sud de la fouille.

Ce type de plan est fréquent dans les régions le long de la mer du Nord et de la Manche, en Bretagne ainsi qu’en Pays de la Loire. Celui de Chaniers est le bâtiment circulaire le plus méridional reconnu à ce jour.

Fig. 5 : Vue aérienne de la maison ronde. Les lignes jaunes dessinent les plans des bâtiments.
Fig. 6 : Restitution d’un grenier surélevé, analogue à ceux de Chaniers (Hunebedcentrum, Borger, Pays-Bas).

Des greniers, des greniers…

Une trentaine de constructions sur quatre poteaux sont regroupées à proximité des maisons circulaires (voir fig. 1), ou de façon plus disséminée. Ces petits bâtiments de plan carré caractéristique sont probablement des greniers surélevés, destinés à la conservation des récoltes (fig. 6).

Un domaine de prestige ?

L’organisation et l’ampleur des aménagements découverts à Chaniers suggèrent qu’il s’agit d’un domaine agricole de grand statut, jouant un rôle majeur dans la région. La proximité de la Charente, axe de communication majeure, renforce probablement cette position. Il est à noter que des fouilles menées en 2009 sur une parcelle voisine complètent le tableau, avec, en particulier, de grands monuments circulaires à vocation funéraire.

Fig. 7 et 8 : Différents modes d’enregistrement des données de fouille, via la tablette numérique et le dessin.

Des silex et des vignes

D’autres occupations humaines ont été détectées. À partir du Paléolithique moyen (il y a 300 000 ans), les hommes de Néandertal ont exploité des gisements de silex. Bien plus près de nous, tout un réseau de fosses témoigne de la culture de la vigne, attestée dès le XVIIIe siècle sur des documents cartographiques.

Un copieux rapport scientifique

Après deux ans de travail, les archéologues ont achevé l’étude des découvertes. Ils ont compilé leurs données, leurs analyses et leurs résultats dans un copieux rapport (fig. 7 et 8). Ce document est remis au Service Régional de l’Archéologie, puis examiné par des experts mandatés par le ministère de la Culture. Une fois validé, le rapport sera mis à disposition sur la plateforme scientifique HAL.

Opération d’archéologie préventive conduite au printemps 2022 au chemin de la Tonnelle à Chaniers, en préalable à la construction d’un lotissement.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie de Nouvelle-Aquitaine.

Maîtrise d’ouvrage : SEMIS

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Florent Ruzzu)

Histoire d’os et d’eau sous la clinique du Parc

Histoire d’os et d’eau sous la clinique du Parc

C’est au cœur d’Autun, au 6 avenue du Morvan, qu’Archeodunum a réalisé une fouille en préalable à l’extension de la Clinique du Parc. L’équipe, dirigée par Mélanie Lefils et Jérôme Besson, est intervenue durant 10 semaines au cours de l’été 2019, sous les fenêtres de la clinique (fig. 1). Sur 4 mètres de profondeur, les archéologues ont exploré un point singulier de la ville romaine, articulation entre son rempart, une de ses rues principales et l’angle d’un îlot construit. Des masses considérables d’ossements témoignent d’activités de boucherie et d’artisanat.

 

Fig. 1 : Vue générale du chantier © A. Maillier – Bibracte
Fig. 2 : Emplacement de la fouille dans le contexte de la ville romaine. © Archeodunum d'après Service archéologique de la ville d'Autun.

Les raisons de l’intervention

C’est l’extension de la Clinique du Parc qui a motivé l’intervention des archéologues, sur prescription du Service Régional de l’Archéologie de Bourgogne-Franche-Comté. Un diagnostic préalable à l’opération a confirmé l’organisation de la ville antique, telle qu’on l’envisageait dans ce secteur depuis des fouilles réalisées en 1989 et 2001 (construction de la Clinique du Parc et de l’Hôpital). Nous nous situons ainsi à l’intérieur du rempart d’Augustodunum, à l’extrémité occidentale d’un grand axe de circulation structurant la ville.

La principale problématique scientifique résidait dans l’articulation entre cette voie majeure et une bande de terrain dite « non constructible » longeant le rempart. La fouille devait également permettre d’appréhender l’angle d’un îlot d’habitation, dont une partie avait déjà été explorée en 2001, et de confirmer ou non la présence d’une tour sur le tracé de l’enceinte (fig. 2).

Fig. 3 : Examen d'un remblai © A. Maillier - Bibracte
Fig. 4 : L’angle de l’îlot VIII/IX 3 © A. Maillier – Bibracte

Petit mais costaud

La fouille a concerné une emprise de 440 m², pour une épaisseur totale de 4 m. Cette profondeur importante a nécessité la présence constante d’une mini pelle mécanique, pour gérer les déblais, et l’aménagement de paliers successifs, pour garantir la sécurité. Au plus bas, la fouille s’est ainsi réduite à 100 m². L’équipe n’en a pas moins identifié 750 couches archéologiques, qui témoignent de l’évolution constante de ce secteur de la ville durant l’Antiquité, entre le Ier et le IVe siècle après J.-C. (fig. 3).

Un angle et des bases

Au nord de la fouille, l’équipe a identifié l’angle de l’îlot urbain déjà largement fouillé en 2001 sous l’hôpital (îlot VIII/IX 3 selon le découpage scientifique en vigueur). Plus précisément, il s’agit d’un mur scandé tous les 4 m par des blocs monumentaux en grès, destinés à accueillir des colonnes (fig. 4). L’ensemble devait former une galerie couverte, comparable par exemple aux arcades de Louhans. Dans un second temps, ce dispositif est abandonné et la façade de l’îlot est reculée de quelques mètres.

Fig. 5 : États successifs de la rue, sillonnée de canalisations © A. Maillier – Bibracte
Fig. 6 : Objets trouvés dans les remblais de la rue : fragments d’enduits peints, assiette et colonnette.

Une des plus grandes rues d’Augustodunum

L’essentiel du site est occupé par la rue nommée decumanus D9, un axe majeur et central de la ville romaine. L’emprise totale de façade à façade, documentée ailleurs dans la ville, approche les 20 m. À la Clinique, l’épaisseur de la chaussée atteint 1,30 m, résultat de multiples réfections. Des remblais, très riches en mobilier, y alternent avec des surfaces de roulement, pavées de cailloux (fig. 5-6).

Que d’eau, que d’eau

Un autre élément remarquable est la grande quantité de dispositifs liés à la gestion de l’eau. Une vingtaine de structures ont été reconnues, se transformant ou se succédant : caniveaux à ciel ouvert entre la rue et les bâtiments, canalisations en bois enterrées pour l’eau propre. Cette profusion rappelle que les rues romaines, à l’instar de nos rues d’aujourd’hui, ne servent pas qu’à la circulation, mais sont également sillonnées de multiples réseaux techniques.

Fig. 7 : Amas d’ossements animaux provenant d’une activité de boucherie.
Fig. 8 : Les ossements sèchent après lavage.

Inconstructible mais colonisé

Au pied du rempart, la bande de terrain non constructible est large de 12 m. Sur notre emprise, ce secteur a livré là aussi des revêtements successifs, indices d’un espace de circulation se rehaussant au fil du temps. Cette zone de marge a également servi de dépotoir, comme en témoignent notamment des masses considérables d’ossements animaux (fig. 7). Ces restes proviennent d’activités de boucherie. Pour partie, ils sont récupérés pour fabriquer des objets (tabletterie).

La tour invisible

Les paliers de sécurité n’ont pas permis d’approcher la potentielle tour. On peut la restituer dans l’axe de la rue et de plan circulaire (diamètre d’environ 11 m), à l’instar de la tour vue au nord vers l’hôpital ou de celle encore conservée dans le parking souterrain de l’Hôtel des Ursulines.

Fig. 9 : Vue générale du chantier au petit matin.

Après la fouille

À l’issue du chantier, le terrain a été investi par les travaux d’extension de la Clinique du Parc. Côté archéologie, nos experts ont étudié l’ensemble des données recueillies (photos, dessins, objets, etc.) afin de comprendre au mieux comment on a vécu et circulé dans ce secteur de la ville romaine d’Augustodunum (fig. 8). Au terme de plusieurs mois de travail, tous les résultats ont été synthétisés dans un rapport de fouille abondamment documenté.

Opération d’archéologie préventive conduite à l’été 2019 au 6, avenue du Morvan à Autun, en préalable à l’extension de la Clinique du Parc.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie de Bourgogne-Franche-Comté.

Maîtrise d’ouvrage : SAI du parc

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Jérôme Besson)

Sainte-Colombe, rendu du rapport d’un très riche site de l’agglomération viennoise antique

Sainte-Colombe “le bourg”
rendu du rapport d’un très riche site de l’agglomération viennoise antique

 

Vendredi 6 octobre, une soixantaine de personnes se sont réunies au Musée et sites gallo-romains (Saint-Romain-en-Gal, Rhône) pour célébrer le rendu du rapport de Sainte-Colombe – Le Bourg, marquant une étape importante dans l’étude de ce site exceptionnel.

Tous les participants à cette aventure humaine inédite étaient réunis : aménageurs, Service régional de l’archéologie, équipe de fouille, spécialistes, restaurateurs, musée… Ils ont pu assister à une conférence de Benjamin Clément pour ensuite admirer le mobilier et les mosaïques restaurés par le CREAM et l’ARM (éléments qui intégreront prochainement le parcours permanent du musée). La journée s’est achevée autour d’un buffet offert par Archeodunum.

Cette journée été l’occasion de souligner la fécondité des partenariats mis en place dès la fouille, qui ont permis de garantir la qualité scientifique de ce travail tout en posant les jalons de sa valorisation rapide pour le grand public.

Remerciements

Tous nos remerciements vont au département du Rhône et au Musée et sites gallo-romains pour avoir grandement facilité l’organisation de cette journée : Damien Raymond (directeur général adjoint), Émilie Alonso (directrice), Guillaume Legrand (assistant de direction), Maria Paraskeva (régisseuse des collections), Sébastien Fily (assistant régie d’œuvres) et Christelle Reymond (chargée de la location des espaces). Merci également au membres du CREAM (Véronique Langlet-Marzloff, Florent Duval et Eve Paillaux) et de l’ARM (Christophe Laporte et Philippe Mercoret), ainsi qu’à Nathalie qui nous a généreusement ouvert son bar Le Neuf pour la suite de la soirée.

 

Opération d’archéologie préventive conduite en 2017 sur la commune de Sainte-Colombe (Rhône), en préalable à la construction de logement par la SCI Le Parc aux Colombes.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie d’Auvergne-Rhône-Alpes.

Maîtrise d’ouvrage : SCI Le Parc aux Colombes

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable :  Benjamin Clément)

 

Décapage en cours de la terre végétale

Sèvremoine, Torfou : premiers résultats de la fouille archéologique

Sèvremoine, Torfou “Le Feuillaudre”

Les premiers résultats de la fouille archéologique

C’est à la création d’un lotissement aux abords du bourg de Torfou, rattaché à la commune de Sèvremoine (Maine-et-Loire), que l’on doit l’ouverture d’une fenêtre archéologique sur le passé de ce secteur. Depuis le 13 mars, les archéologues d’Archeodunum mettent au jour les vestiges d’une vaste ferme de la période romaine.

En préalable au nouveau lotissement du Pré aux Sources : diagnostic et fouille

Prescrite par le Service Régional d’Archéologie des Pays de la Loire, l’opération d’archéologie préventive a été motivée par l’aménagement, par la commune de Sèvremoine, d’un nouveau lotissement. La fouille a été précédée d’un diagnostic archéologique (évaluation portant sur environ un dixième du terrain), qui a révélé des vestiges de l’Antiquité.

Décapage en cours de la terre végétale
Décapage en cours de la terre végétale

Sous la terre végétale, 600 vestiges

Sur les 25 000 m2 à fouiller, le travail a commencé par un décapage réalisé à l’aide de pelles mécaniques. Ces engins ont permis de retirer la terre végétale sur 0,30 à 0,50 m d’épaisseur. Sous ce recouvrement de surface, plus de 600 aménagements ont été mis au jour : empreintes de poteaux, fosses diverses, structures de combustion, fossés et chemins. Ces vestiges appartiennent majoritairement à la période antique, plus particulièrement au Ier s. après J.-C. Les objets archéologiques, comme les fragments de céramique gallo-romain, sont de précieux indices pour dater les occupations. Quelques traces d’activités humaines aux périodes médiévale ou moderne ont également été décelées.

Archéologues fouillant des "trous de poteau"
Archéologues fouillant des "trous de poteau"

Un enclos de 3800 m²

Au sein de tout un réseau de creusements, trois fossés d’environ 60 m de long et 1,2 m de profondeur ceinturent un espace de 3 800 m2. Les archéologues n’ont pas encore pu distinguer de constructions à l’intérieur de l’enclos. Il est très probable que ces dernières n’aient pas laissé de traces. Cet aménagement semble correspondre à un élément central d’une grande ferme de la période antique, dont les limites ne sont pas encore connues.

Plan général des vestiges
Plan général des vestiges
Poterie antique retrouvée lors de la fouille d'une fosse
Poterie antique retrouvée lors de la fouille d'une fosse

Des bâtiments à ossature bois

À l’extérieur de l’enclos, plusieurs alignements de trous d’ancrages de poteaux en bois, également appelés « trous de poteau » par les archéologues, permettent de restituer des plans de bâtiments gallo-romains. Pour la construction, on recourait à des matériaux périssables (terre et bois), qui n’ont laissé que peu de traces dans le sol. Les fonctions de ces édifices de grande ampleur sont vraisemblablement multiples : hangar de stockage, zone de travail artisanal, parcage des animaux… Ils constituent vraisemblablement des aménagements majeurs de cette grande ferme antique.

Des chemins d’accès plus récents ?

Un chemin d’époque moderne se superpose à la partie sud de l’enclos antique. Il se poursuit à l’est sur un axe nord-sud. La fouille permettra de savoir si l’un ou l’autre de ces chemins, visible sur les cadastres anciens était déjà en place durant l’Antiquité.

Après la fouille …

Au terme de l’intervention, en juin 2023, le patrimoine archéologique aura été sauvegardé par le travail de terrain, et la commune pourra poursuivre l’aménagement du lotissement du Pré aux Sources. Côté archéologie, les investigations se poursuivront en laboratoire durant deux ans. Un important travail d’étude sera réalisé par les archéologues et les spécialistes, de manière à obtenir le maximum d’information. Des analyses par le radiocarbone permettront d’affiner la datation des différents contextes. Un rapport abondamment documenté synthétisera l’ensemble des résultats de cette opération.

Téléchargez la plaquette de présentation du site au format PDF.

Visite du site

Le samedi 6 mai, des portes ouvertes sont organisées sur le site. Venez rencontrer les archéologues !

Opération d’archéologie préventive conduite au printemps 2023 sur la commune de Sèvremoine (Maine-et-Loire), en préalable à la création d’un lotissement.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie des Pays de la Loire

Maîtrise d’ouvrage : Commune de Sèvremoine

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Marc-Antoine Dalmont)

Nort_fouille

Plus de 4000 ans d’histoire sur les bords de l’Erdre

Plus de 4000 ans d’histoire sur les bords de l’Erdre

Archéologie sur la “déviation nord” de Nort-sur-Erdre (Loire-Atlantique)

Une équipe d’une douzaine d’archéologues a procédé à une vaste fouille archéologique sur la commune de Nort-sur-Erdre tout au long de l’année 2022. Cette opération a été prescrite par le Service Régional de l’Archéologie. Elle était motivée par la création, par le Département de Loire-Atlantique, d’un axe routier contournant le centre de la ville. Sur près de 15 hectares, les archéologues d’Archeodunum ont mis au jour des vestiges datés de l’âge du Bronze, de l’Antiquité et du Moyen-âge, dont des aménagements de berge le long de l’Erdre.

 

Vue aérienne du site de « La Pancarte » (© Anthony Béranger)
Vue aérienne du site de « La Pancarte » (© Anthony Béranger)
Plan général de l’intervention archéologique
Plan général de l’intervention archéologique

Une vaste surface à explorer aux abord de l’Erdre

Sous la direction d’Audrey Blanchard, l’équipe a travaillé par étapes entre février et novembre 2022. On distingue les lieux-dits dits « Saint-Yves » (ouest), « L’Onglée » (centre) et « La Pancarte » (est). Les archéologues ont mis au jour plus de 3 000 aménagements. Ces vestiges appartiennent à plusieurs phases chronologiques : âge du Bronze ancien, âge du Bronze final, Moyen-âge et Antiquité.

Archéologues au travail
Archéologues au travail
Archéologues au travail (© Anthony Béranger)
Archéologues au travail (© Anthony Béranger)

Sur les plateaux, deux habitats de l’âge du Bronze

Sur les plateaux situés de part et d’autre de l’Erdre, deux occupations humaines de l’âge du Bronze ont été décelées. À l’ouest, sur le site de « Saint-Yves », la fouille a révélé de nombreuses fosses d’ancrage de poteau. Plusieurs alignements permettent de restituer des plans de bâtiments, tous à ossature de bois ancrée dans le sol et dont les parois sont réalisées en matériaux périssables (clayonnage et torchis). Les archéologues ont reconnu des petits greniers à quatre poteaux ou des bâtiments de superficie plus imposante. Des fosses jouxtent ces constructions. Certaines, dites « polylobées » en raison de leur forme complexe, contenaient de nombreux fragments de céramique attribuables à l’âge du Bronze final (1350-800 av. n. è.).

À l’est, sur le site de « La Pancarte », les creusements sont plus arasés, mais permettent également de restituer des plans de bâtiment. Le mobilier céramique, rare, renvoie à une phase plus ancienne : âge du Bonze ancien à moyen (2000-1350 av. n. è). Un fossé circulaire de 10 m de diamètre environ pourrait quant à lui indiquer l’existence d’une architecture funéraire au sud de l’habitat.

Près de la rivière, un enclos gallo-romain

Sur le site de « L’Onglée », à proximité de l’Erdre, l’équipe a découvert un vaste enclos daté de l’Antiquité (Ier– IIIe s. de n. è.). Ce dispositif prend la forme de deux fossés parallèles, qui délimitent un espace habité doté de plusieurs bâtiments quadrangulaires.

 

Vue aérienne d’un fossé circulaire probablement daté de l’âge du Bronze (© Anthony Béranger)
Vue aérienne d’un fossé circulaire probablement daté de l’âge du Bronze (© Anthony Béranger)
Aménagements de berge au bord de l’Erdre (© Anthony Béranger)
Aménagements de berge au bord de l’Erdre (© Anthony Béranger)

Des aménagements au bord de l’eau

Dans la plaine alluviale, à proximité immédiate de l’Erdre, les sondages ont révélé des vestiges d’aménagement de berge : des pieux verticaux et des pièces de bois horizontales forment des caissons quadrangulaires. Le milieu, très humide, a permis une bonne conservation du bois. Les premiers éléments de datation plaident en faveur d’un aménagement médiéval.

Les Nortais à la découverte de leur patrimoine

Près de 260 habitants de Nort-sur-Erdre et des communes alentour ont pu visiter le site archéologique lors des Journées Européennes du Patrimoine, le samedi 17 septembre 2022. Quatre classes de collégiens de la ville ont également fait le déplacement et ont pu bénéficier d’échanges enrichissants avec les archéologues.

Après la fouille …

Au terme de l’intervention de terrain, les investigations se poursuivront en laboratoire durant deux ans. Les archéologues et les spécialistes d’Archeodunum vont exploiter les informations recueillies sur le terrain. Des analyses par le radiocarbone ou par dendrochronologie (pour dater les pièces de bois des berges) permettront d’affiner la datation des différents contextes. Tous les résultats de l’opération seront synthétisés dans un rapport abondamment documenté et argumenté.

En laboratoire, fouille d’un vase prélevé sur le site
En laboratoire, fouille d’un vase prélevé sur le site

Opération d’archéologie préventive durant l’année 2022 sur la commune de Nort-sur-Erdre (Loire-Atlantique), en préalable à la déviation nord de la commune.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie du Pays de la Loire

Maîtrise d’ouvrage : Département de Loire-Atlantique

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Audrey Blanchard)

Découverte d’une petite agglomération romaine à Belleville-en-Beaujolais

Belleville-en-Beaujolais, déviation sud-est de la RD109

Découverte d’une petite agglomération romaine

 

C’est dans le cadre du projet de la déviation sud-est de Belleville que le Service régional de l’archéologie a prescrit une fouille archéologique, réalisée par Archeodunum entre juillet et octobre 2022. Les premiers résultats en sont spectaculaires, avec la découverte d’une série de bâtiments d’époque romaine. Ceux-ci font face au quartier artisanal exploré en 2020 sur la ZAC Lybertec, de l’autre côté de la route D306. L’ensemble constitue une occupation dense, révélant l’existence d’une petite agglomération, à quelques kilomètres au nord de Ludna (Saint-Georges-de-Reneins).

À proximité de la Voie de l’Océan

Depuis des temps très anciens et jusqu’à aujourd’hui, la vallée de la Saône sert d’axe de circulation majeur. Au lendemain de la conquête de la Gaule (milieu du Ier s. av. J.-C.), les Romains pérennisent ou installent un réseau routier naissant de Lyon pour monter vers le nord et l’ouest de la Gaule (Voie dite de l’Océan), desservant notamment Mâcon puis Chalon-sur-Saône. Le long de cette artère maîtresse se développent habitats, lieux d’étape, petites ou grandes agglomérations. C’est dans ce contexte que s’inscrivent les fouilles menées à Belleville-en-Beaujolais.

Plan général du secteur 1, fouillé par Archeodunum
Plan général du secteur 1, fouillé par Archeodunum

De discrets gaulois

Deux secteurs font l’objet d’investigations archéologiques. À proximité du Lac des Sablons et de l’autoroute A6, des traces ténues (négatifs de poteaux, fosses diverses) évoquent assez discrètement une occupation gauloise. Trouvé dans une fosse profonde d’environ 40 cm, un ensemble de poteries est ainsi datable de la fin de l’âge du Fer (milieu IIe – début Ier siècle avant J.-C.).

Découverte de poteries gauloises
Découverte de poteries gauloises
Les mêmes poteries gauloises au fond d'une fosse
Les mêmes poteries gauloises au fond d'une fosse

Un site gallo-romain bien structuré

C’est directement en contrebas du rond-point de la RD109, à l’emplacement du départ de la future déviation, que les découvertes sont les plus remarquables. Sur une surface de près de 6000 m2, de nombreux vestiges sont datés de l’époque romaine (Ier – IIIe siècle après J.-C.). Le site, très bien organisé, se développe pour l’essentiel sur la moitié ouest de la zone de fouille. Il est limité à l’est par un mur de clôture et par un fossé d’axe nord-sud, mais se poursuit hors emprise au nord, au sud et à l’ouest.

Portion de mur construit essentiellement en fragments de tuiles
Portion de mur construit essentiellement en fragments de tuiles
Vue aérienne des fondations du bâtiment 3, une grange ?
Vue aérienne des fondations du bâtiment 3, une grange ?

Au moins cinq bâtiments

Les nombreux murs, dont seules sont conservées les fondations en galets et en blocs de calcaire, dessinent les plans d’au moins cinq bâtiments. Ceux-ci semblent répartis en deux parcelles contiguës, séparées par un mur constitué de fragments de tuiles. Parmi ces constructions, on remarque le plan presque complet d’une grange de plan carré (bâtiment 3).

Hypocauste et foyers

À l’est du bâtiment 4, le bâtiment 5 livre dans sa démolition de nombreux matériaux (briques creuses, pilettes carrées, mortier de tuileau) qui suggèrent la présence d’un hypocauste : ce dispositif de chauffage par le sol, bien connu dans le monde romain, pourrait équiper des bains privés (thermes). Les alentours livrent d’autres types de vestiges, dont des fosses et un puits, ainsi que plusieurs foyers, peut-être liés à une activité artisanale.

Foyer constitué de tuiles plates (tegulae), disposées à l'envers
Foyer constitué de tuiles plates (tegulae), disposées à l'envers

Autour d’une voie fantôme

Ces résultats sont à apprécier en regard de la fouille menée en 2020 par la société Éveha sur le site de la ZAC Fontenailles, de l’autre côté de la route D306. On y a découvert un quartier à vocation artisanale (travail du métal en particulier). Les orientations des bâtiments sont identiques, et l’ensemble donne l’impression d’une occupation cristallisée de part et d’autre d’un axe fort, situé par hypothèse sous la D306. Par extension, il est tentant de restituer à cet endroit le passage de la Voie de l’Océan – à moins qu’il ne s’agisse d’une voie secondaire.

Ludna ou Lunna ?

Ces nouvelles données permettront également d’alimenter une discussion ancienne mais non tranchée à propos des sites de Ludna et de Lunna, que deux sources antiques mentionnent entre Anse et Mâcon (article à ce propos). Il n’est pas clair si les deux noms, très similaires, désignaient un même lieu, ou deux sites différents. Les dernières recherches penchent en faveur d’un lieu unique, positionné à Saint-Georges-de-Reneins. Désormais, il paraît établi qu’il existait à l’époque romaine une autre petite agglomération à proximité immédiate de l’actuel Belleville-en-Beaujolais !

Et après ?

À l’issue de la fouille, en octobre 2022, l’aménagement routier se poursuivra. Côté archéologie, les investigations se dérouleront en laboratoire durant deux ans. Un important travail d’étude sera réalisé par les archéologues et les spécialistes – notamment pour réfléchir à l’articulation entre Ludna et Lunna ! Finalement, les résultats seront rassemblés dans un copieux rapport, remis à l’État avec l’ensemble de la documentation et des objets collectés sur le site.

Opération d’archéologie préventive conduite durant l’été 2022 sur la commune de Belleville-en-Beaujolais (Rhône), en préalable à la déviation sud-est de la commune.

Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie d’Auvergne-Rhône-Alpes.

Maîtrise d’ouvrage : Département du Rhône

Opérateur archéologique : Archeodunum (Responsable : Jérôme Grasso)