Aux portes de la Bretagne, le châtelet d’Ancenis se révèle
En 2024, la mairie d’Ancenis Saint-Géréon (Loire-Atlantique) s’est engagée dans la restauration et la réhabilitation du châtelet, ancienne porte d’entrée du château constituée d’un couloir voûté flanqué de deux tours. À terme, l’objectif est de rendre l’édifice accessible au public. Avant de bâtir son projet de restauration, l’architecte du patrimoine avait besoin des premières clés de compréhension de l’histoire architecturale du monument. Cette mission de quelques jours, confiée à Archeodunum, a permis d’éclairer les grandes phases qui ont ponctué la vie de l’édifice.
Ancenis au Moyen Âge : une place-forte des marches de Bretagne
À l’époque médiévale, la Bretagne est un duché autonome, rival du royaume de France. Les zones frontalières cristallisent alors les conflits : du nord au sud, sur environ 250 km, des châteaux sont édifiés sur des points stratégiques. Située le long de la Loire, axe commercial important et avant-poste de Nantes, la ville d’Ancenis joue un rôle crucial dans la défense des frontières tout au long du Moyen-Âge. Son château y apparaît comme un indispensable pivot du dispositif défensif mis en place le long de la frontière bretonne (Fig. 2 et 3).
Avant le châtelet : une première tour
Si le secteur du châtelet avait déjà fait l’objet d’investigations archéologiques (un diagnostic en 2004, une fouille aux abords en 2015), l’édifice proprement dit restait à étudier (fig. 4). Et c’est une riche histoire que révèlent ses maçonneries ! Nos archéologues ont pu montrer qu’à cet emplacement existait une première tour, qui a ensuite servi de base à la partie sud du châtelet. Ce premier édifice, qui reste à dater, est aujourd’hui conservé en plan sur une moitié seulement, et sur deux niveaux. Le sous-sol accueillait une salle de stockage voûtée, et une fosse à latrines. Au-dessus, deux pièces à vivre équipées de cheminées, éclairées par une baie, témoignent de la fonction résidentielle de l’ensemble (fig. 5).
Le châtelet (fin du XVe siècle) : une construction innovante en période troublée
C’est sans doute au cours de l’un des épisodes de conflit entre la France et la Bretagne que la tour d’origine est partiellement détruite. La moitié restante, toujours fonctionnelle, est intégrée dans un châtelet, construit entre 1488 et 1503. Ce nouveau dispositif sert de défense avancée et d’accès au château. Le passage d’entrée adopte un plan en chicane, une configuration qui apparaît comme innovante – ou singulière – pour l’époque. Il est défendu par un double pont-levis et par une herse (fig. 6-7 ; voir fig. 4). Au sommet des tours, les adaptations les plus récentes à l’artillerie sont également déployées, notamment grâce à des terrasses dotées de canonnières typiques de la dernière décennie du XVe siècle (voir fig. 1).
Une topographie transformée
L’histoire récente du château est marquée par de nombreuses destructions, et le châtelet est un des derniers bâtiments qui matérialisent l’ancienne puissance du lieu. En contrebas des anciennes fortifications, le comblement du fossé (autrefois large de 20 m et profond d’au moins 10 m !) a fortement transformé la physionomie du site et de ses abords. Du fait de ces remblaiements, seule la partie supérieure du châtelet demeure visible, alors que ses tours s’enfoncent encore de plusieurs mètres sous le sol d’aujourd’hui (fig. 8).
Des données précieuses pour guider la restauration
Les résultats archéologiques vont désormais nourrir le projet de restauration de l’architecte du patrimoine. Selon les orientations et les interventions qui seront décidées, de nouvelles investigations archéologiques pourraient être menées, notamment depuis des échafaudages, pour être au plus près des maçonneries et enrichir davantage la compréhension du châtelet d’Ancenis.
Opération d’archéologie programmée conduite en octobre 2024, sur la commune d’Ancenis Saint-Géréon, en préalable au projet d’aménagement du châtelet.
Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie des Pays-de-la-Loire
Maîtrise d’ouvrage : Commune d’Ancenis Saint-Géréon
Architecte du patrimoine : Claire Dukers, cabinet Post
Opérateur archéologique : Archeodunum
Responsable : Margaux Lainé



















































































